Le tour du monde des vulnérables
Une Odyssée en 10 épisodes
à la découverte des pouvoirs de la vulnérabilité
- EPISODE 10 -
Le monde vulnérable
Comprendre
Un récit et des théories pour comprendre les bases
Ressentir
Un témoignage inspirant à regarder ou écouter
Expérimenter
Des expériences pratiques pour passer à l’action
Bienvenue à bord du Tour du Monde des Vulnérables : chaque semaine, une navigation en 3 temps pour explorer les pouvoirs de la vulnérabilité.
Durée : 25 min (dont 7 de lecture), avec le grand témoignage d'Olivier Hamant
VOTRE PROGRESSION : 10/10
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Bienvenue sur le Tour du Monde des Vulnérables ! Ce Tour du Monde, c’est comme une série Netflix : il vaut mieux commencer par le premier épisode.
Si vous avez manqué le début, c’est par ici.
Il y a de quoi être fasciné. Ils sont capables de vivre de 6 000m d’altitude à -4000m sous la mer, de faire varier la proportion d’eau de leur corps de 3 à 80 %, de résister à des radiations 1000 fois plus puissantes que les humains, et même de survivre 5 jours sans oxygène…
Ce sont les tardigrades. Et ils sont quasiment invulnérables.
Invulnérables, peut-être… mais aussi très moches.
L’invulnérabilité vous fait rêver ? Si vous suivez ce Tour du Monde depuis le début, on espère que non…
Pour deux raisons :
- Invulnérables, les tardigrades n’ont pas évolué depuis plus de 500 millions d’années. Pas de vulnérabilité, pas de changement…
- Dans la nature, les tardigrades sont une exception. Car si on regarde vraiment la nature, on s’aperçoit qu’elle est fondamentalement vulnérable et que c’est précisément ce qui fait sa force – ou, plus précisément, sa robustesse.
Pour cet ultime épisode du Tour du Monde des Vulnérables, on plonge du côté de la Nature pour parler de la différence entre performance et robustesse, et rappeler que la vulnérabilité est non seulement au cœur de notre planète – mais qu’elle doit aussi être au cœur de nos modèles de société.
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L'OCEAN VULNERABLE : LE MONDE VULNERABLE
Alerte contre-sens : non, la vulnérabilité ne met pas en danger nos systèmes. C’est même tout l’inverse.
Pour le comprendre, commençons par une petite balade en forêt. En regardant vite, on pourrait ne voir que des troncs puissants qui s’élèvent vers le ciel. Mais en baissant les yeux et en regardant vers le sol, on peut aussi avoir une autre vision des choses…
Les deux visions de la forêt
Comme l’explique le biologiste Olivier Hamant, notre grand témoin du jour, une forêt n’est pas un environnement performant. Il y a le gâchis des feuilles au sol, les surplus stockés dans le tronc, les réseaux de racines bien trop denses, les écureuils qui hibernent pendant des mois…
Et pourtant, on se balade souvent dans nos sociétés comme dans les forêts : on ne regarde que la performance sans forcément prêter attention à la robustesse de l’ensemble.
Car oui, il y a une différence. Et un bref rappel des définitions n’est sans doute pas inutile :
- 🏎️ Performance = efficacité (capacité à atteindre un objectif) + efficience (capacité à utiliser le minimum de ressources pour atteindre cet objectif).
- 🚲 Robustesse = capacité à traverser les crises.
Aujourd’hui, nos sociétés sont ivres de performance. L’obsession de l’optimisation nous poursuit jusque dans nos trajets en voiture ou dans l’organisation de nos vacances. La pause, le simple ralentissement sont parfois vécus comme des échecs.
Et pourtant, il faut rappeler que même si la société de la performance veut à tout prix éradiquer la vulnérabilité, celle-ci est pourtant le principe directeur des 3,5 milliards d’années de R&D qui ont permis l’apparition et le développement de la vie. Alors qu’à l’échelle de la planète, le culte de la (sur)performance n’est qu’un épiphénomène…
Tiens d’ailleurs…
C’est parce qu’on est vulnérable qu’on évolue et qu’on s’adapte à un environnement hostile.
Dans la Nature, les êtres vivants se construisent sur leur contre-performance et sur leurs points faibles. Très fragile à la naissance, l’être humain est l’un des mammifères les plus exposés aux périls, aux prédateurs ou aux intempéries. Mais, ayant accepté sa vulnérabilité, notre espèce a appris à coopérer.
Comme le dit l’historien Yuval Noah Harari :
« Les humains savent coopérer plus efficacement que les chimpanzés, ce qui explique qu’ils lancent des vaisseaux spatiaux à destination de la lune quand les chimpanzés lancent des cailloux sur les visiteurs du zoo. »
Privilégier la surperformance sur la vulnérabilité est tentant, car cela nous donne une illusion de puissance. Mais en réalité, ces deux principes sont tout aussi indispensables.
Que nous apprend la Nature ? Que l’alternance performance/vulnérabilité est bien au cœur du fonctionnement de notre planète. Il y a bien sûr l’indispensable repos hivernal qui permet l’explosion printanière. Mais même le climat, socle des échanges gazeux, thermiques, hydriques, du déplacement des semences et des espèces vivantes, repose précisément sur l’alternance de phénomènes dépressionnaires et surpressionnaires :
La dépression est nécessaire à la fabrication des anticyclones, et vice versa.
Un climat qui ne reposerait pas sur cette alternance ne fonctionnerait tout simplement pas.
Sans pause, la quête permanente de la surperformance n’est jamais viable. Le guépard, l’animal terrestre le plus rapide, ne peut maintenir sa vitesse de pointe de 120km/h que pendant 30 secondes. Autre exemple ? Le fonctionnement du corps humain. En réalité, c’est à 40°C que notre système immunitaire est le plus performant. Sauf que, au-delà d’un certain temps, cet état met en péril le reste de l’organisme. Le corps se régule pour rester la plupart du temps autour de la température sous-optimale mais viable de 37,5°C.
Comme le dit notre grand témoin Olivier Hamant :
La robustesse, c’est garder des marges de manœuvre en diminuant la performance. »
Et la différence entre un système robuste et un système basé sur la performance, c’est évidemment l’acceptation de la vulnérabilité.
Pour revenir aux forêts, c’est bien leur robustesse qui leur a permis, depuis leur apparition il y a 400 millions d’années, d’évoluer, de se réinventer, et de survivre à des crises auxquelles ont succombé des espèces censées être plus évoluées – mais en réalité plus fragiles, comme les dinosaures.
Le symbole de la robustesse de la forêt, c’est en quelque sorte l’humus : cette matière dégradable, hautement vulnérable, que l’on pourrait considérer comme un gâchis, alors que c’est par elle que la forêt se régénère.
Symboliquement, on pourrait dire que nos sociétés modernes ont, en quelque sorte, l’humus en horreur. On cherche l’éternel summer, les plantes vivaces. On repousse les limites, la finitude, et même la mort.
Mais en réalité, cette quête effrénée d’optimisation ne fait qu’accroître notre fragilité et notre exposition aux risques systémiques :
- Epidémies type COVID
- Blocage du commerce mondial (bateau sur le canal de Suez)
- Blocage du trafic aérien mondial (volcan islandais)
- Panne mondiale d’Internet
Il devient donc urgent de réhabiliter la vulnérabilité. L’humanité dégrade de plus en plus son environnement. Aujourd’hui, on estime que 6 des 9 limites planétaires ont déjà été dépassées.
On dit souvent qu’il n’y a pas de planète B. On pourrait aller plus loin : il n’y a pas de planète B. Il n’y a qu’une planète V – comme vulnérable.
Il n’y a pas de planète B. Il n’y a qu’une planète V – comme Vulnérable.
Heureusement, autour du globe, plusieurs groupes d’individus ou associations ont déjà pris conscience de la nécessité de ce changement de regard et font avancer les choses dans le bon sens.
Quelques exemples :
- 🦠 La crise de la Covid en 2020 : elle a certes exposé les plus fragiles, mais aussi généré des initiatives innovantes : porter des repas pour les personnes âgées, proposer des gardes d’enfants improvisées, télétravailler, télé-enseigner, mettre son appartement à disposition des soignants vivant loin de leurs lieux de travail…
- 🌊 Des villes “résilientes” comme Copenhague anticipent les bouleversements climatiques : en cas de fortes pluies, certains parcs ont été aménagés pour se transformer en réservoirs d’eau.
- 🚛 À San Francisco, l’initiative « Zero Waste » a permis de détourner des décharges 80 % des déchets de la ville grâce à l’implication des communautés locales.
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Dans tous ces exemples, la prise de conscience de la vulnérabilité favorise l’émergence de solutions durables et la responsabilisation des citoyens. Dans la nature comme dans les sociétés humaines, elle permet le développement de symbioses et de projets coopératifs. C’est en cela que la prise de conscience et le changement de regard sur la vulnérabilité sont si décisifs : sans eux, nous ne pourrons pas répondre à l’urgence ni transformer en profondeur nos modèles de société.
Comme chaque semaine dans le Tour du Monde des Vulnérables, découvrez les récits de nos grands témoins dans « Ressentir », puis apprenez à partager vos vulnérabilités dans « Expérimenter ».
Alors, on continue ?
Olivier hamant : UnE NATURE ROBUSTE
Chercheur en biologie végétale, Olivier Hamant s’inspire du vivant pour repenser nos modèles de société. Sorte de La Fontaine moderne, il réinvente la fable du chêne et du roseau pour nous rappeler la distinction entre force et robustesse. Car oui, on peut être vulnérable ET robuste ! C’est même tout le principe… Pour comprendre comment, découvrez son témoignage.
Retrouvez les histoires de tous nos grands témoins en version podcast sur notre page SoundCloud.
« La connaissance s’apprend par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information » disait Einstein.
Seule l’expérience transforme vraiment le coeur des hommes. Et vous aider à vous transformer, c’est bien notre ambition !
Chaque semaine, nous vous proposons une expérience pratique pour vous reconnecter à votre vulnérabilité ou à celle des autres.
À VOIR
- Tardigrade, l’animal indestructible, documentaire disponible sur Youtube.
À LIRE
- Le monde sans fin, de Jean Marc Jancovici et Christophe Blain
- Deux livres de Harmut Rosa : L’Accélération (une critique sociale du temps) et Résonance
- L’homme qui plantait des arbres, de Jean Giono
- La Vie Secrète des arbres, de Peter Wohlleben, adapté en BD.
- Humus, de Gaspard Koenig
- Le culte de la performance, d’Alain Ehrenberg.
"Faire le tour du monde, c’est faire le tour de soi-même."
C’est ce que disent les marins, et c’est tout l’objet du voyage du Tour du Monde des Vulnérables.
La vulnérabilité est au cœur du vivant. Que ce soit les espèces ou la planète, les individus ou les entreprises, sa prise en compte est indispensable à l’élaboration d’un système robuste et résilient. Où, en acceptant leur vulnérabilité, les individus peuvent :
- 🔍 mieux se connaître (et être plus épanouis)
- 🤝 davantage se lier (pour mieux coopérer)
- ✨ s’inspirer pour évoluer et se nourrir
- 🔧 transformer le monde dans le bon sens
On ne pourra pas relever les défis d’aujourd’hui et demain sans accepter notre vulnérabilité. Alors, pour finir, nous n’avons plus qu’un seul message : relayez ce Tour du Monde. Faites grandir la flotte VULNERABLE – parce que vulnérables ensemble, on a tout à gagner.
Merci encore d’avoir suivi le Tour du Monde des Vulnérables.
À bientôt, et d’ici là…
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